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Cet article va parler de la procédure: de la réception de l’ échantillon de selle à la sortie de l’antibiogramme: Comment ensemencer? comment lire les caractères culturaux? Quels sont les tests d’identification à utiliser? Quels antibiotiques tester? Nous allons donner les réponses à toutes ces questions.
Sommaire
- Macroscopie-type de la selle en cas de salmonellose ou shigellose
- Ensemencement et repiquage
- Microscopie
- Lecture des caractères culturaux des colonies
- Tests d’orientation
- Identification biochimique proprement dite
- Choix des antibiotiques à tester
Précédemment, nous avons traité le sujet de la coproculture par défaut. C’est à dire la recherche de salmonelles shigelles lors d’ une coproculture de routine. Aujourd’hui, nous souhaitons parler de l’identification propre des salmonelles et shigelles, toujours dans le cadre d’une coproculture de routine : macroscopie, état frais, Gram, tests d’orientation, galerie d’identification, résistances naturelles aux antibiotiques, ce qui constitue une aide à l’identification. Tel est le programme.
Le sérotypage des Salmonella fera l’objet d’un prochain article. Abonnez-vous pour en être informé, ainsi que pour nos prochaines publications. Vous pouvez trouver la procédure de coproculture de routine avec un schéma récapitulatif en cliquant ici.
Macroscopie type de la selle en cas de salmonellose ou shigellose: 1ère étape de la coproculture
Les salmonelles et shigelles provoquent unelles provoquent un syndrome dit dysentériforme (qui voit le sang et le mucus passer dans les selles). «La shigellose est aussi appelée dysenterie bacillaire ».
Ce tableau décrit, l’aspect des selles qui doit alerter le technicien sur la possibilité d’une telle infection.

Généralement, l’observation de l’aspect des selles se fait sur paillasse, avec un bec Bunsen allumé pour créer un environnement aseptisé, et ainsi éviter les contaminations. L’on recherche les éléments suspects: glaire, mucus, sang, pus, changement de couleur.
Ensemencement sur bouillon d’enrichissement et repiquage sur gélose d’ isolement
Enrichissement de la selle pour salmonelles-shigelles
Si il n y a pas de partie suspecte, la selle est homogéneisée à l’aide d’une anse de platine stérilisée à la flamme et refroidie à l’air près de la flamme. S’il ya des parties suspectes, elles sont sont prélevées. Enfin, l’ensement d’un échantillon de la taille d’une oese est fait dans le milieu d’enrichissement: Bouillon sélénite ou Muller Kauffman. Le bouillon est incubé pour 4h à 6h, à 35-37°C.
Le but de l’enrichissement est d’inhiber la croissance des espèces autres que Salmonella et Shigella, afin de maximiser le potentiel de croissance de ces dernières. Il y a généralement une compétition entre les microorganismes pour la survie, ne l’ oublions pas! Et dans 1 g de selle, il y a des milliards de bactéries…
Généralement, ce bouillon est contenu dans un tube stérile à vis visible ci-dessous. Pour une explication détaillée sur le bouillon selenite, bien vouloir lire l’article de notre confrère.

Ensemencement: Repiquage sur Hektoen ou gélose SS
Après 4 à 6h, le bouillon d’enrichissement est repiqué, c’est à dire ensemencé sur la gélose d’isolement. L’idéal serait qu’elle soit à la fois différentielle (nous permet de repérer les colonies suspectes), et sélective (inhibe les espèces non recherchées).
La gélose est incubée 18 à 24 heures à 35-37°C, en aérobiose. Il est important de repiquer la gélose dans ce délai, car les susbstances qui inhibaient les espèces autres que Salmonella, et Shigella ne feront plus effet.
Nous, dans cette procédure,choisissons les géloses Salmonella-shigella (SS), décrite par cet article. Et Hektoen, également bien décrite ici . Il faut noter que la gélose SS a un effet plus sélectif que hektoen sur Shigella spp. Certaines souches ne pousseront pas. Il serait donc vraiment recommandable de toujours enrichir la selle, si l’on doit utiliser SS comme milieu d’isolement. Ceci pour maximiser les chances de retrouver la shigelle qui infecte notre patient.
Microscopie des selles à Salmonella et Shigella

Les selles de shigellose et de salmonellose sont caractérisées par du pus, du mucus, et du sang. Aussi au microscope, l’on notera donc une abondance de polynucléaires, et d’hématies comme le montre la photo. Le frottis de selle coloré au Gram permettra d’observer des bacilles Gram négatif sans particularité.
Lecture des boites de culture: Comment identifier les colonies suspectes

Salmonella et Shigella sont incapables de produire de l’acide à partir de l’utilisation de lactose, de saccharose ou de salicine. C’est pourquoi elles donnent des colonies, vert clair ou bleu verdâtre sur milieu Hektoen et incolores sur gélose Salmonella-shigella. Ceci permet de les différencier rapidement des organismes non pathogènes[4].

Ces deux photos sont tirées de l’ atlas photographique Leboffe et Pierce [5]


NB: Proteus mirabilis est également producteur de H₂S, d’ où les colonies noires. Voici un exemple pour lequel des tests d’orientation et d’identification sont donc nécessaires avant de conclure. Ils ne doivent pas être escamotés. Le Gram de contrôle permettra d’observer des bacilles Gram négatif dans tous les cas.
Généralement, un oeil averti et exercé peut arriver à percevoir des différences entre espèces bactériennes au microscope, mais l’identification doit se poursuivre. Pour un algorithme de la coproculture de routine, bien vouloir lire le schéma suivant.
Tests d’orientation
Après l’incontournable test d’oxydase,qui pour Salmonella spp et Shigella spp, doit être négatif ,nous pouvons procéder à un test d’uréase, et de la production d’indole. Ici nous avons des images de résultats positif et négatif.


Les résultats potentiels pour les Salmonella spp. et les Shigella spp. peuvent être les suivants:

Identification biochimique des salmonelles et shigelles proprement dite
Après ces tests d’orientation, l’on peut ensemencer une galerie d’identification biochimique pour retrouver l’espèce.
Ici nous avons utilisé la galerie Enterosystem 18 R.

Choix des antibiotiques
Apparition de souches multirésistantes
D’après l’ Institut Pasteur [6], les antibiotiques permettent généralement une guérison rapide et sans séquelles pour Shigella spp. Et pour Salmonella spp, « la gastro-entérite peut disparaitre en quelques jours sans traitement chez des adultes de condition physique normale. Mais ce dernier peut devenir nécessaire pour les personnes âgées, les nourrissons ou les personnes immunodéprimées. Pour elles, l’infection peut être plus sévère, voire mortelle ».
Toujours d’après l’ institut Pasteur [6], l’ émergence de souches multirésistantes de Shigella, particulièrement, S. flexneri et S. dysenteriae 1 à tous les antibiotiques dits de première ligne (ampicilline, tétracycline, sulfaméthoxazole-triméthoprime, chloramphénicol, acide nalidixique). Il est donc devenu d’usage d’utiliser des antibiotiques plus rares et bien plus chers (fluoroquinolones et céphalosporines de 3ème génération).
Le choix des antibiotiques à tester au laboratoire: Résistance naturelles
Les antibiotiques à tester peuvent être choisis selon les recommandations du Comité de l’Antibiogramme de la Société Française de Microbiologie.
Celles-ci sont faites par le biais d’un guide mis à jour chaque année. Voici l’ édition d’ Avril 2021.
D’après ce guide, les antibiotiques à tester sont les mêmes que ceux des autres entérobactéries, avec un bémol cependant pour l’azithromycine.
Toujours d’ après ce guide, « la résistance naturelle est caractéristique d’une espèce bactérienne. Elle délimite le spectre naturel de l’antibiotique et constitue une aide à l’identification. »
Les enterobactéries sont naturellement résistantes aux:
- Pénicilline G, oxacilline
- Macrolides sauf azithromycine pour Salmonella et Shigella
- Kétolides, lincosamides, streptogramines,
- Acide fusidique, glycopeptides, oxazolidinones, lipoglycopeptides, rifampicine.
Conclusion
Pour conclure, il était important dans cet article de démontrer comment isoler et identifier au sein d’une flore complexe, les salmonelles et shigelles, particulièrement recherchées dans une coproculture de routine. De prochains articles permettront de détailler l’ ensemencement, l’ identification des bactéries, ou encore l’antibiogrammeen général. Merci donc, de vous abonner pour ne perdre aucune publication.
Bibliographie
1. Cheesbrough M. (2010). District Laboratory Practice in Tropical Countries. 2nd edition Update. Part 2. Cambridge University Press
2.Sagar A. (201). Selenite F Broth- Composition, Principle, Uses, Preparation and Result Interpretation. Repéré à https://microbiologyinfo.com/selenite-f-broth-composition-principle-uses-preparation-and-result-interpretation/
3.Tankeshwar A. (2015).Hektoen Enteric (HE) agar: composition principle and uses. Repéré à http://microbeonline.com/hektoen-enteric-agar-composition-principle-uses/
4. Tankeshwar A. (2016).Salmonella-shigella (SS) agar: composition principle procedure and results. Repéré à http://microbeonline.com/salmonella-shigella-ss-agar-composition-principle-procedure-results/
5.Leboffe J.M &Pierce E.B. (2011). A photographic Atlas for the Microbiology Laboratory. 4th edition. Morton Publishing
6. Institut pasteur. (2019). Shigellose. Repéré à https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/shigellose
Avertissement: La procédure ci-dessus décrite est un exemple. Pour la rendre applicable dans votre laboratoire, elle doit être validée par votre directeur technique.
Les auteures:
-Rédigé par Renée A. LEYEBE, titulaire d’une Licence en Sciences de la Santé, option Analyses Médicales

-Validé par Petronile NGO ETOUNDE, titulaire d’un Master en Microbiologie et Immunologie.
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